70 ans des Francas 72
70 ans d’éduc’pop avec les Francas de la Sarthe, ça se fête ! En 2024, les Francas de la Sarthe…
Un accueil matinal est organisé au Foyers de jeunes travailleurs, Adelis, situé sur l’île de Nantes. Dans la salle, Thierry Péridy, directeur régional de la jeunesse des sports et de la cohésion sociale, prend la parole. Le discours est juste, simple, ponctué de mots qui fédèrent l’assemblée présente. On ressent le souci de préserver les valeurs de la République autour de la laïcité dans la mobilisation et le besoin grandissant de formations autour de l’accompagnement des jeunes. La première intervention de la journée est celle d’Henri Elie, inspecteur pédagogique régional de philosophie au rectorat de l’académie de Nantes. Son discours autour de la laïcité permet de questionner la salle : « La laïcité est un socle solide, grâce au lien social, cependant, elle constitue aussi une fragilité à cause de l’idée que l’on se fait d’elle, elle dépend entièrement de notre volonté à la croire. » Ainsi, nous devons faire perpétuer sa solidité qui tient de notre volonté de la faire exister au quotidien et d’en assurer l’effectivité. Selon lui, la pédagogie de la laïcité dépend de trois critères : la liberté liant la construction de soi à la rencontre et au respect de l’autre, le paradoxe loi/liberté, et enfin la fraternité qui est l’incarnation des sentiments envers les valeurs de cœur et d’esprit.Un sketch théâtral de la compagnie du Théâtre de l’Éphémère vient conclure cette première intervention en jouant sur les différentes religions.
Ensuite, c’est au tour de David Rouu, inspecteur pédagogique régional d’histoire-géographie au Rectorat de l’académie de Nantes, de prendre la parole. Une intervention ancrée sur l’histoire et l’actualité de la laïcité. Celle-ci, à la française, puise ses racines dans l’autonomisation progressive du pouvoir politique par rapport aux Églises en Europe de l’Ouest. Mais, et là toute l’originalité de son histoire, elle en est progressivement venue à constituer une valeur centrale du projet républicain, en incarnant sa spiritualité. En ce sens, elle ne saurait se réduire aux simplifications qui en sont parfois faites au nom d’intérêts particuliers dans les méandres des débats de la société. Un autre sketch est interprété afin de conclure cette matinée de définitions et d’histoire.
En quoi la laïcité s’incarne-t-elle dans les actions associatives ? Elle s’inscrit dans le socle de valeurs de l’Éducation Populaire. Elle offre un champ d’intervention diversifié au cœur des engagements des acteurs ligériens. A travers sept représentations-témoignages, la laïcité illustre son actualité et sa force mobilisatrice favorisant ainsi l’émancipation des individus dans un espace collectif toujours en construction.
Les différentes associations ont présenté leurs projets et actions autour du thème de la laïcité :
• La Mairie de la Chapelle-sur-Erdre, en Loire-Atlantique, a présenté un jeu-exposition afin de sensibiliser les enfants à la laïcité. La forme de ce jeu : déambulation dans une ville fictive (place de la République, boulevard de la liberté,…)
• La Fédération des centres sociaux et socio-culturels de Vendée a présenté la formation de bénévoles (FDVA)
• L’association Graine de citoyen, en Maine-et-Loire, a présenté son action principal sur la gestion des conflits et la médiation entre élèves. Ces derniers étant les acteurs de cette médiation.
• La LICRA 44, en Loire-Atlantique, a présenté ses actions de sensibilisation à la lutte contre le racisme
• La DRJSCS et la DDCS de Vendée, ont présenté le projet Formation/Construire un espace dédié à l’expression des jeunes
• Les Francas ont présenté l’animation jeunesse (exposition Zoos humains) au collège Gaston Serpette à Nantes, L’histoire pour construire un autre regard : comment accompagner les jeunes à déconstruire leurs représentations pour faire reconnaître l’égalité de tous.
• L’association Nantes Floorball (UFOLEP 44), a présenté ses actions autour de la laïcité et les pratiques sportives.
La dernière intervention de la journée est animée par Pierre TOURNEMIRE, Vice-président de la Ligue de l’enseignement et président de la commission nationale laïcité. Un socle juridique à l’épreuve du réel, la laïcité est le principe d’organisation du cadre juridique assurant la liberté de conscience et garantissant la liberté d’expression des convictions de chacun. C’est aussi une valeur militant pour l’émancipation de tous et permettant de « faire société » dans un cadre pacifié. Comment ce principe et cette valeur se traduisent par les actions dans les espaces collectifs, envers les éducateurs, les enseignants et les animateurs ? Des échanges avec la salle ont permis de débattre sur le côté militant de la laïcité.
Les derniers mots de cette journée ont été prononcés par François LACO, directeur régional adjoint de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale. Les différents discours de cette journée permettent de mettre en exergue la pratique de la laïcité de nos jours et dans les différentes structures, afin d’élaborer de nouveaux projets dans les nombreuses associations de la région, autour de ce principe fondamental de respect de soi et des autres.
En début d’après-midi, sous un grand soleil, un parcours de découverte de différents lieux de la ville est organisé ; les jeunes se promènent le long des quais de la Loire pour rencontrer des associations comme Les Anneaux de la Fraternité et l’Espace Simone de Beauvoir ainsi que le Mémorial de l’esclavage et le Palais de justice. « Ce parcours est intéressant, souligne François, animateur, il recouvre plusieurs thématiques comme le racisme, le droit des femmes, le sexisme ou l’esclavage. Il me semble pertinent que les jeunes découvrent la laïcité à travers des sujets différents ». Pendant la visite, les jeunes sont attentifs à ce que les intervenants des structures leur expliquent leurs actions. Ils sont également curieux d’en savoir plus : « on entend beaucoup parler du racisme, mais qu’est-ce que c’est exactement ? » se demande Margot, 13 ans. Ils apprennent des choses sur le passé et les comparent à leur société aujourd’hui : « le racisme est-il toujours présent ? » lance un garçon. Un autre se demande « est-ce que l’esclavagisme existe toujours sous d’autres formes aujourd’hui ? ». À l’Espace Simone de Beauvoir, c’est une occasion d’aborder le sexisme et le droit des femmes. « Mais quelles formes prend le sexisme dans notre vie de tous les jours ? » se questionne Amina. Après ces visites, les jeunes se retrouvent au Studio 11/15, pour reprendre des forces autour d’un goûter et participer à de nouvelles activités.
« On entend beaucoup parler du racisme, mais qu’est-ce que c’est exactement ? »
Pour commencer, deux animateurs des Francas proposent un débat mouvant. Il se déroule dans une grande pièce lumineuse. L’espace est divisé en deux par un trait noir au sol. Trois affirmations sont posées tour à tour aux jeunes par les animateurs. Chacun se positionne ensuite dans l’espace de la pièce selon son avis par rapport à la phrase. Ceux qui sont d’accord avec l’affirmation se mettent à droite du trait. Ceux qui ne le sont pas vont à gauche. Et ceux qui n’ont pas d’avis précis se placent sur le trait. Le but est ensuite d’argumenter son choix afin de faire changer l’avis des autres. Après les explications, le débat commence. Malgré un après-midi chargé en information, les jeunes sont dynamiques et n’hésitent pas à s’exprimer sur les phrases proposées. Certains sont plus timides et préfèrent se positionner sans exposer leurs arguments. D’autres sont, au contraire, plus à l’aise à l’oral.
La première phrase était « Les hommes et les femmes sont traités égalitairement dans la société ». Lors de ce débat, les jeunes ont surtout évoqué le monde du travail. « Je ne suis pas d’accord, car les hommes et les femmes ne peuvent pas accéder à certains métiers à niveau égal » lance Maxime. « En plus, les hommes sont plus payés que les femmes » renchérit une jeune fille.
La deuxième phrase était « L’égalité c’est être tous pareils et respecter les mêmes règles ». La majorité explique que nous sommes tous différents mais quand même égaux. Cependant, tous sont d’accord avec la deuxième partie de la phrase. L’un d’entre eux, Ilyess, dit : « nous devons respecter les mêmes règles, c’est plus juste ». Mais, pour certains, « cela est juste théorique mais ne se voit pas dans la réalité ». À la fin de ces deux débats, les jeunes arrivent à un consensus : ils ne sont pas d’accord avec l’affirmation posée au départ.
«Nous sommes tous différents mais quand même égaux »
La dernière phrase : « Je peux m’exprimer librement et dire tout ce que je veux », est celle sur laquelle les jeunes s’expriment le plus. Pour commencer, un garçon parle du principe de liberté d’expression, « il permet de pouvoir m’exprimer comme je veux » dit-il. Le reste du groupe saisit alors cette occasion pour parler des attentats du 7 janvier 2015 dans les locaux de Charlie Hebdo. Anis, l’un des jeunes, s’exprime particulièrement sur ce sujet. Peut-être est-ce pour lui un moyen de pouvoir parler de ce qu’il ressent, dans un endroit où il sent que sa parole est légitime ? Il dit par exemple : « On ne peut pas tout se permettre de dire, par rapport à la religion des autres par exemple, il faut la respecter, on ne peut pas s’en moquer, comme l’a fait Charlie Hebdo ». Une jeune fille n’est pas d’accord, pour elle « personne n’a dit qu’on ne pouvait pas s’exprimer sur une religion (comme faire une caricature), ça dépend de chacun ». Le débat se termine alors sur la question des limites de la liberté d’expression.
Un grand nombre de propos intéressants sont ressortis de cet échange car les jeunes se sont sentis écoutés sur ce qu’ils avaient à dire. Lors de cette deuxième partie de l’après-midi, les jeunes ont également participé à deux autres activités. Un vidéomaton est mis en place pour recueillir des témoignages et la Radio Wewewe leur ouvre le micro lors d’une émission diffusée en directe.
Cette journée a donc permis d’impulser une réflexion à tous les jeunes en prenant appui sur des exemples concrets et des thématiques diversifiées, afin de comprendre la notion complexe de « laïcité ».