70 ans des Francas 72
70 ans d’éduc’pop avec les Francas de la Sarthe, ça se fête ! En 2024, les Francas de la Sarthe…
Plusieurs études scientifiques démontrent l’importance de prendre en compte les rythmes pour favoriser les apprentissages. Les enfants ont durant la journée des moments de plus ou moins
forte vigilance. L’Académie de médecine notait dans son rapport analysant les rythmes biologiques et psychosociologiques de l’enfant « Aménagement du temps scolaire et santé de l’enfant »
que « l’aménagement du temps scolaire en France n’est pas en cohérence avec ces connaissances de la chronobiologie de l’enfant et cela à tous les niveaux de l’organisation, journée, semaine ou année scolaire ». Pour le primaire, elle recommandait d’organiser « une semaine scolaire sur une journée moins longue (5 h par exemple et sur une semaine de 4 jours et demi ou 5 jours comme dans la plupart des pays européens) ». Mieux répartir le temps scolaire (une semaine de 9 demi-journées dont 5 matinées par exemple) permet de programmer les séances d’apprentissage fortement mobilisatrices (sur le plan cognitif) à des moments où la faculté de concentration des enfants est la plus grande et donc de leur permettre de mieux apprendre.
Les temps périscolaires favorisent la découverte d’activités diversifiées. Les enfants peuvent découvrir grâce à ces propositions, tout au long de leur scolarité, une pluralité de pratiques collectives culturelles, sportives, scientifiques, numériques qui leur permettent de développer progressivement des compétences transversales d’ordre cognitif, social et socio-affectif. Activités scolaires et périscolaires se complètent et renforcent les apprentissages. Les travaux des chronobiologistes et psychologues, cités dans le rapport de l’Académie, montrent que les activités péri- et extra-scolaires (socioculturelles et sportives) sont importantes, lorsqu’elles sont bien dosées « car elles participent au déroulement harmonieux des différentes phases du sommeil et à l’épanouissement physique et psychique des élèves en améliorant les comportements, l’écoute, l’attention et donc l’apprentissage ».
La France est, de loin, le pays où les élèves du primaire ont le moins de jours d’école : 162 jours par an contre 183 pour la moyenne européenne. Cette moyenne tombe à 144 jours si l’on retient
la semaine de quatre jours. Selon le dernier rapport annuel de l’OCDE « Regard sur l’éducation » de 2017, l’élève français assiste dans le même temps à un nombre d’heures à l’école astronomique : 864 heures contre 776 en moyenne dans l’Union à 22. Pour le Conseil national d’évaluation du système scolaire, parmi les 35 pays membres de l’OCDE, la France est devenue, en quelques dizaines d’années, le pays le plus inégalitaire en matière d’éducation. L’aménagement du temps scolaire est un facteur décisif pour les élèves en difficulté car « les variations journalières des performances intellectuelles sont encore plus présentes chez les élèves qui ne maîtrisent pas la tâche » (Académie de médecine).
De plus, la semaine de 4 jours et demi peut mieux permettre l’accès aux activités culturelles et sportives hors de l’école à ceux qui n’en bénéficient habituellement pas. La généralisation des Projets éducatifs territoriaux a permis l’accès à ces activités à plus d’enfants. Dans son rapport de mai 2016, la sénatrice Françoise Cartron note qu’avant la réforme, il y avait 14 416 accueils collectifs de mineurs déclarés et 983 000 enfants accueillis et qu’en 2015, après généralisation, 31 952 accueils collectifs de mineurs et 3,06 millions d’enfants accueillis.
Un tiers des emplois occupés par les femmes le sont à temps partiel, notamment pour dégager le mercredi. Une étude publiée par l’Institut des politiques publiques montre que la réforme des rythmes scolaires a permis en moins de 2 ans de réduire de 15 % le différentiel de temps de travail le mercredi entre hommes et femmes. Même si toutes les femmes ne sont pas touchées de la même manière selon leur catégorie socioprofessionnelle, on note ainsi l’impact imprévu de cette mesure sur l’organisation familiale et le développement du travail des femmes en particulier.
La répartition du temps scolaire sur 5 jours a pu générer des difficultés d’organisation dans les premières années qu’il ne s’agit pas de nier. Pour dépasser ces difficultés désormais identifiées, le travail sur l’aménagement des rythmes doit être poursuivi en individualisant davantage l’organisation selon l’âge des enfants (en prenant en compte notamment les rythmes des maternelles), en renforçant la relation aux familles, en s’attaquant aux inégalités territoriales, en poursuivant la valorisation de la filière animation…
Au-delà du débat portant sur le seul temps scolaire entre une semaine de 4 jours ou de 9 demi-journées, l’objectif doit être celui de favoriser la réussite éducative de tous les élèves et enfants. La réforme a été insuffisamment évaluée mais les nombreuses collectivités qui avaient engagé de larges consultations et s’étaient investies dans cette réorganisation, doivent être soutenues. L’enjeu consiste dès lors à prolonger les dynamiques engagées ces dernières années sur les territoires pour améliorer notamment les Projets éducatifs territoriaux (PEdT).
Le temps scolaire ne représente que 10 % de la vie de l’enfant : il est donc primordial de s’intéresser à l’ensemble de ses autres temps éducatifs et de penser leur amélioration qualitative et leur articulation : les temps péri et extrascolaires, les temps en famille, les temps entre pairs, les temps passés devant les écrans, les temps de vacances… La réflexion éducative constitue un tout compte tenu de la continuité des temps pour l’enfant.
En déclarant l’ensemble des temps périscolaires en accueil collectif de mineurs (ACM), les municipalités garantissent la mise en place de normes strictes (taux d’encadrement, qualification des animateurs, élaboration d’un projet pédagogique…) sous le contrôle des services de l’État.
Le centre de loisirs éducatif, deuxième structure d’accueil après l’école et institution du temps libre reconnue sur tous les territoires, peut constituer un espace pivot à même de favoriser la continuité et la cohérence éducative sur les territoires de vie des enfants. Le centre de loisirs périscolaire ou centre de loisirs associé à l’école (CLAE) à un rôle de proximité temporelle évident ; le centre de loisirs extrascolaire a également toute son importance.
Le centre de loisirs éducatif peut jouer un rôle de tiers ou de médiation entre école et parents. L’accent est porté, notamment dans les temps périscolaires, sur l’information aux parents et sur la relation quotidienne. Les animateurs de ces centres de loisirs étant, de fait, beaucoup plus disponibles que les enseignants.
Le décret permettant le retour à la semaine de 4 jours confirme l’existence du Projet éducatif territorial. Il convient que ce dernier reste le cadre de la dynamique collective engagée y compris dans le cas d’un retour à la semaine de 4 jours. Cette dynamique vise, quel que soit le nombre de jours d’école, à construire un projet éducatif commun sur un territoire partant de l’intérêt des enfants voire les adolescents qui y vivent. L’enjeu est bien aujourd’hui de travailler à leur amélioration qualitative. Pour cela, le Projet éducatif territorial doit être le cadre d’une réflexion sur l’accessibilité des activités et la lutte contre les inégalités : tarifs et taux d’effort, qualité éducative…
La définition et la mise en oeuvre d’un projet éducatif territorial permet souvent de mieux associer les parents. Chaque espace éducatif doit pour cela laisser et donner du pouvoir d’agir aux parents, y compris ceux qui semblent les plus éloignés des codes de l’école. Prendre le temps, trouver les espaces et les modalités pour associer tous les parents, c’est les reconnaître dans leur fonction éducative, c’est aussi leur permettre d’appréhender le rôle de l’école, des espaces éducatifs inscrits dans la proximité de celle-ci et sans doute, in fine, contribuer à leur donner confiance en l’école.
Le développement de partenariats territoriaux entre institutions et acteurs concernés par l’éducation a conforté des réseaux. Il a permis le développement d’alliances éducatives au service des enfants et des adolescents, renforcé l’échelon territorial de proximité dans l’animation de ces alliances et le travail en transversalité. Le rapport parlementaire de Françoise Cartron a mis l’accent sur la diversité des partenariats possibles en fonction des ressources de chaque territoire, y compris dans les communes rurales, que ce soit avec des musées, des instituts de recherche, le réseau CANOPE, les associations éducatives, culturelles ou sportives, les Parcs naturels régionaux…
La qualité des offres éducatives est un critère essentiel d’attractivité des territoires. Cette dimension est très importante dans les grandes périphéries urbaines et en milieu rural, touchées par les risques de chute démographique et de désertification. Dans ce cadre, le Projet éducatif territorial, s’il passe du contrat au véritable projet, peut être un outil important à prendre en compte dans une logique de développement social local. Une offre éducative globale, incluant une politique de la petite enfance, doit ainsi se penser en lien avec les enjeux d’accès aux services publics, d’urbanisme, d’habitat et de transport.
Le Projet éducatif territorial devrait comprendre systématiquement un volet formation. Développer la qualité de l’acte éducatif passe en effet par l’accès de tous les acteurs éducatifs professionnels à des formations continues et partagées. La formation professionnelle initiale des animateurs nourrit la qualité de l’action territoriale. Il est donc nécessaire de développer l’accès à des parcours certifiants aux métiers de l’animation pour tous les intervenants professionnels.
Mieux, les formations partagées pluriacteurs (enseignants, animateurs, ATSEM…) rendent possible une meilleure connaissance et reconnaissance des rôles et des fonctions de chacun.
L’éducation est un bien commun. Elle doit être partagée, « dialoguée », discutée par le plus grand nombre de citoyens. Des espaces de mobilisation citoyenne, de rencontre et de coopération entre les citoyens et les experts et professionnels de l’éducation peuvent dès lors être favorisés. Centrés sur les questions éducatives, ils peuvent éclairer et nourrir les réflexions, les travaux des élus, des collectifs de pilotage et de mise en oeuvre de Projets éducatifs territoriaux.
Il existe peu d’études sur l’impact de l’aménagement du temps scolaire. Toutefois, certains maires ont commandé des enquêtes pour évaluer les impacts de la nouvelle organisation scolaire
afin de prendre une décision en toute connaissance de cause. À Arras, une étude scientifique approfondie a été menée par l’Observatoire des Rythmes et des Temps de Vie des Enfants et des Jeunes. Les principaux résultats de l’enquête ont montré que l’aménagement du temps scolaire a eu des effets positifs sur les élèves (comportements, apprentissages, développement personnel, habiletés sociales), sur les relations entre enseignants, parents et animateurs et sur l’organisation pédagogique et éducative de l’école (décloisonnement, articulation scolaire/périscolaire, relations avec la collectivité locale, climat scolaire).
Cela vaut également pour les Projets éducatifs territoriaux. Des évaluations participatives doivent permettre de réaliser les ajustements nécessaires afin d’améliorer le projet mis en place.
Cette évaluation externe peut se nourrir des critères élaborés de façon collective, afin de mesurer les effets constatés et les améliorations proposées auprès de l’ensemble des personnes concernées,
dont les enfants.